Mira s’Ă©tait endormie dans le large fauteuil en velours si doux et si confortable qui se trouvait tout prĂšs de la grande baie vitrĂ©e.
Ă travers celle-ci, on pouvait voir un immense et magnifique jardin dont la pelouse venait tout juste d’ĂȘtre tondue il y a Ă peine deux jours et qui Ă©tait Ă prĂ©sent toute imbibĂ©e dâeau Ă cause de l’interminable pluie.
Tout était redevenu calme dehors et peu à peu les petits moineaux revenaient se poser gaiement sur les branches dénudées des grands amandiers.
En haut de leurs cimes et par certaines ramifications de leurs branchages ; on pouvait remarquer quelques nids détruits.
Il faut dire que la tempĂȘte avait Ă©tĂ© d’une rare violence… Elle n’avait rien Ă©pargnĂ©…
Pourtant, Ă voir les moineaux sautiller de branches en branches tout en piaffant entre eux ; ils ne semblaient guĂšre rancuniers au saccage de leurs petites demeures.
Sans doute que dans leurs langages dâoiseaux, ils prĂ©voyaient dĂ©jĂ dâen reconstruire de nouvelles.
Par moment, ils venaient sâabreuvoir ou encore sâamuser dans les quelques flaques dâeau un peu boueuses qui sâĂ©taient formĂ©es tels des petits cratĂšres dans les zones clairsemĂ©es de la pelouse.
Finalement, la pluie tant mĂ©prisĂ©e leur avait apportĂ©e de lâeau pour se dĂ©saltĂ©rer mais aussi la joie de pouvoir faire la toilette de leurs plumages.
Et câĂ©tait un spectacle des plus merveilleux que celui de pouvoir les observer en train de dĂ©ployer leurs petites ailes et secouer avec frĂ©nĂ©sie leurs plumes faisant alors jaillir dâinnombrables gouttelettes dâeau autour d’eux.
Les moineaux avaient enfin retrouvĂ© leur joie de vivre comme si la tempĂȘte nâĂ©tait jamais apparueâŠ
Mais ce n’Ă©tait hĂ©las pas le cas le cas pour tout le mondeâŠ
Au centre du jardin, Ă lâintĂ©rieur dâun pourtour de galets blancs ; de hauts rosiers buissons de couleur rouge-Bordeaux avaient perdu de leurs splendeurs Ă cause des incessantes bourrasques de vent qui sans vergogne, les avaient entiĂšrement dĂ©pouillĂ©es de leurs si jolies et gracieuses pĂ©tales.
Elles sâĂ©taient envolĂ©es de part et dâautre du jardin et reposaient de-ci de-lĂ sur lâimmense pelouse telles de belles endormies.
Elles avaient Ă©tĂ© arrachĂ©es de force Ă leur mĂšre nourriciĂšre et ne tarderaient pas Ă sâabĂźmer puis Ă se flĂ©trir au fil des heures.
Mais pour lâinstant, leur couleur rouge si profonde offrait un contraste des plus ravissant et romantique sur la vaste pelouse verte pomme.
La rageuse tempĂȘte nâavait pas rĂ©ussi Ă dĂ©truire la magnificence de ce lieu habituellement si charmant par temps radieuxâŠ
Les oiseaux tout comme les vĂ©gĂ©taux semblaient vouloir oublier ses terribles affres en continuant leur vie bien paisible tout en attendant avec une certaine impatience la venue de « Monsieur Soleil » qui les rĂ©chaufferait de bon cĆur de ses ardents et lumineux rayons.
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La pluie sâĂ©tait arrĂȘtĂ©e de tomber depuis dĂ©jĂ quelques bonnes heures mais toujours pas de Monsieur soleil Ă lâhorizon…
Pourtant Ă cet instant mĂȘme, le ciel venait de changer de nuance et sa couleur si grise de tout Ă lâheure sâĂ©tait alors transformĂ©e en un joli bleu gris parsemĂ© de gros nuages effilochĂ©s.
Des nuages qui n’allaient pas tarder Ă s’Ă©vaporer selon les dires de lâannonce mĂ©tĂ©orologique diffusĂ©e hier soir Ă la tĂ©lĂ©vision.
Cependant, Monsieur Soleil se faisait encore attendre et ne daignait toujours pas pointer le bout de son nez…
Que Diable attendait-il pour faire son entrée ?
Soudain, ĂŽ Miracle ! les premiers rayons apparurent et commencĂšrent Ă traverser les vitres des deux grandes fenĂȘtres du salon ainsi que celle de la baie vitrĂ©e ; caressant au passage, la tĂȘte de Mira qui reposait sur l’un des accoudoirs moelleux du fauteuil.
La douce lumiĂšre sâinsinua davantage Ă lâintĂ©rieur de la piĂšce, la rendant alors beaucoup plus spacieuse et conviviale.
Elle finit ensuite par se projeter avec fougue sur les jolies courbes anatomiques de Mira et s’y attarda longuement en y faisant une jolie danse dâondulation.
Elle explorait ainsi ce corps endormi en ne cessant dây dessiner Ă lâinfini de douces vagues tels des tatouages Ă©phĂ©mĂšres.
Elle aimait jouer avec les sens de Mira mais que cherchait-elle exactement ?
Mira ne le savait que trop bien et faisait semblant de ne pas comprendre…
Elle ressentait les chaudes caresses des rayons du soleil lui rĂ©chauffer le corps mais elle ne voulait pas encore lui cĂ©der⊠Pas tout de suite⊠Pas maintenantâŠ
De son cĂŽtĂ© Mademoiselle LumiĂšre mettait du cĆur Ă lâouvrage en se faisant de plus en plus pressante et insistanteâŠ
Elle jouait de plus belle avec MiraâŠ
Brusquement, comme si une mouche venait de la piquer ; elle fini par se lasser de ce petit jeu et dĂ©cida de terminer son incessante danse lumineuse en sâinstallant sur le bout de son nez ; obligeant ainsi cette derniĂšre Ă ouvrir peu Ă peu ses grands yeux verts en amande.
La lumiĂšre fut si forte que Mira dut les plisser afin de les accoutumer Ă son intense luminositĂ©âŠ
Il faut dire que depuis pas mal dâheures dĂ©jĂ , il avait fait trĂšs sombre dans cette piĂšce.
Elle se souvenait encore des myriades de gouttelettes de pluie qui n’avaient eu de cesse de se projeter avec fracas contre les vitres des deux fenĂȘtres ainsi que sur celle de la baie vitrĂ©e lui donnant alors un lĂ©ger mal de tĂȘte suivi d’une irrĂ©sistible envie de dormir et de rejoindre sans plus tarder son cher fauteuil si douillet.
Mais le soleil venait Ă prĂ©sent la dĂ©ranger juste pour la rĂ©veiller alors quâelle ; elle voulait encore et encore dormir telle une Belle au bois dormant.
« Soleil ! va-tâen ! Tu aurais dĂ» venir avant⊠Câest trop tard maintenant ! Je ne veux plus sortir de mon fauteuil si doux et si moelleux⊠Et puis tu as beau ĂȘtre le maĂźtre de lâunivers que cela nây changerait rien alors laisse-moi tranquille »
Mais Mademoiselle LumiĂšre lui chuchota Ă lâoreille :
« Tu dois te lever Mira ! Tu as des choses à faire. Et puis, tu as suffisamment dormi, ne trouves-tu pas petite flemmarde ? »
« Non, non⊠Pourquoi viens-tu me rĂ©veiller ? Va-tâen ! JâĂ©tais en train de faire un merveilleux rĂȘve⊠Oh ! Et puis tu mâĂ©nerves ! OK ! Tu as encore gagnĂ© ! »
Sortant enfin de sa léthargie, Mira finit par ouvrir en grand ses jolis yeux verts irisés de constellations ambrées qui se voyaient davantage avec la lumiÚre du soleil.
Elle se leva de son fauteuil et s’Ă©tira longuement Ă cause des courbatures qu’elle avait attrapĂ©es Ă force dâĂȘtre restĂ©e trop longtemps endormie dans la mĂȘme position.
Ă chaque fin de repas, elle avait pour habitude de faire une sieste.
C’Ă©tait pour ainsi dire, le meilleur moment de toutes ses journĂ©es mais aujourd’hui, son sommeil n’avait pas Ă©tĂ© rĂ©parateur Ă cause du vacarme de cette fichue pluie qui lui avait donnĂ© un terrible mal de tĂȘte avant de sâendormir.
Et le comble de tout, c’est que celle-ci n’avait eu de cesse de tomber depuis 11 heures du matin jusqu’Ă 15H30 ; de quoi la mettre de trĂšs mauvaise humeur…
Mais fort heureusement, elle ne le resterait pas bien longtemps vu quâelle Ă©tait dâune nature toujours trĂšs gaie et optimiste.
Elle fit un long bĂąillement Ă sâen dĂ©faire la mĂąchoire mais câĂ©tait beaucoup plus pour exprimer son agacement que celui dâune fatigue quelconque puisquâelle nâavait point sommeil Ă cet instant-lĂ .
Monsieur soleil avait osé lui envoyer une de ses fidÚles servitrices pour la réveiller.
Et bien entendu, Mademoiselle LumiĂšre n’avait pas hĂ©sitĂ© la moindre seconde Ă s’exĂ©cuter illico presto…
Elle, toujours prĂ©sente et si dĂ©vouĂ©e Ă son poste depuis des millions et des millions dâannĂ©es devait trĂšs certainement trouver un certain plaisir non dissimulĂ© Ă vouloir rĂ©veiller le monde entier.
Sa tĂąche quotidienne d’illuminer de mille feux notre planĂšte lui tenait tant Ă cĆur quâil ne valait mieux pas lui rĂ©sisterâŠ
Et puis, de toute façon, elle avait lâart et la maniĂšre de savoir se faire respecter…
Câest pourquoi Mira ne lui en voulut plus du tout et quand bien mĂȘme son sommeil nâavait pas Ă©tĂ© rĂ©parateur ; eh bien, elle ferait avecâŠ
Monsieur Soleil nâavait donc pas eu si tort que ça de lui envoyer sa fidĂšle compĂšre pour la dĂ©loger de son fauteuil sinon qui d’autre lâaurait fait ?
Décidément, ces deux-là étaient trÚs complémentaires ! Et il savaient remplir leur rÎle à la perfection : lui, de tourner autour de notre bonne vieille planÚte terre et elle, de nous propager de ses intenses faisceaux lumineux.
Ainsi, grĂące Ă lâĂ©clat de leur rayonnement, le monde s’en trouvait heureux.
En conclusion, nous ne ferions pas grand-chose sans eux…
Câest pourquoi Mira se sentit Ă prĂ©sent dâhumeur plus guillerette et prĂȘte Ă affronter cette fin dâaprĂšs-midi.
Elle sâĂ©tira encore tout en regardant le salon qui Ă©tait devenu nettement plus lumineux ; semblant alors reprendre enfin vie.
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Mira avait toujours aimé cette piÚce qui ne manquait jamais de luminosité par temps radieux.
Par contre, par temps de pluie, le salon s’habillait alors d’une lugubre et austĂšre apparence qu’elle dĂ©testait au plus haut point ; lui faisant un tantinet peur et sursauter au moindre bruit.
Elle avait toujours eu une sainte horreur de la pluie et ce, depuis sa plus tendre enfance !
Mira s’Ă©tira une derniĂšre fois puis regarda par la baie vitrĂ©e l’immense pelouse qui Ă©tait toujours autant imbibĂ©e d’eau.
Elle leva les yeux au ciel et constata qu’il avait pris une jolie teinte d’un bleu limpide, sans le moindre nuages.
« Quel bien joli ciel ! » se dit-elle en ne se lassant pas de l’admirer.
Le fameux proverbe : « AprÚs la pluie vient le beau temps » était bien vrai.
La preuve était devant ses yeux ébahis.
Elle lâadmira encore quelques instants puis dĂ©cida de s’extirper avec hĂąte de son fauteuil. Elle avait des tas de choses Ă faire…
Finalement, cette fin de journĂ©e ne serait pas si morose que ça se dit-elle tout en marchant et en regardant autour d’elle.
Elle repensa alors Ă Laura qui lui avait dit juste aprĂšs le repas de ce midi, qu’elle irait faire des courses mais qu’elle ne tarderait pas pour revenir.
Elle se souvenait également que celle-çi lui avait promis une petite surprise dÚs son retour. Mais laquelle au juste ?
Mira n’aimait pas trop les surprises et elle bouillonnait dĂ©jĂ d’impatience de revoir au plus vite sa maman.
Mais en attendant celle-çi, que pourrait t-elle bien faire d’intĂ©ressant ?
Elle l’ignorait encore mais trouverait bien une idĂ©e d’ici lĂ …
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Mira avait toujours aimé cette grande et belle demeure située en pleine campagne.
Elle Ă©tait certes assez Ă©loignĂ©e de la ville mais pas si isolĂ©e que ça par rapport au voisinage bienveillant qui lâentourait.
Oui, Mira était vraiment heureuse de vivre ici.
Et parmi toutes les piÚces de la maison ; elle avait une nette préférence pour le grand salon.
C’Ă©tait son endroit favori.
Il faut dire que sa Maman Laura l’avait dĂ©corĂ© avec beaucoup de goĂ»t en agrĂ©mentant chaque pan de mur, de jolis tableaux d’aquarelles.
Ses propres Ćuvres qu’elle aimait peindre durant ses heures de loisir car oui ; en dehors de son mĂ©tier de professeure de Français, Laura Ă©tait aussi une artiste peintre extrĂȘmement douĂ©e.
Mira ne se lassait jamais de regarder ses toiles tant elles étaient belles.
Soudain, elle fut prise d’Ă©motion lorsque son regard s’attarda sur l’une d’entre elles.
Celle qu’elle prĂ©fĂ©rait le plusâŠ
Celle qui la reprĂ©sentait et dont elle Ă©tait si admirativeâŠ
Il s’agissait de son propre portrait.
Mira se souvenait encore de ce merveilleux jour oĂč Laura Ă©tait devenue sa mĂšre adoptive.
Il y avait 5 ans de ça.
5 ans de pur bonheur se dit-elle en admirant le tableau.
Une toile que sa douce et si belle Maman avait peint en son honneur pour lui dire Ă quel point elle l’aimait de tout son cĆur et de toute son Ăąme.
La toile Ă©tait si bien rĂ©ussie que Mira avait l’impression de se voir dedans comme dans un miroir tant la ressemblance Ă©tait frappante.
Sa Maman avait su la dessiner et lâimmortaliser telle qu’elle Ă©tait…
Oui, elle Ă©tait vraiment fiĂšre de ce tableau…
Elle avait eu beaucoup de chance de tomber sur une Maman telle que LauraâŠ
Et pour tout l’or du monde, elle n’en aurait souhaitĂ© une autre car oui, sa Laura Ă©tait un ĂȘtre unique et Ă partâŠ
Cinq belles annĂ©es qu’elle grandissait et Ă©voluait Ă ses cĂŽtĂ©s, entourĂ©e de plein d’amour.
Un amour pur et sincĂšre dont elle avait cruellement manquĂ© autrefois mais qui aujourd’hui comblait son cĆur.
Un amour si profond qu’elle avait fini par oublier les maltraitances subies dans son passĂ©…
Un passĂ© dĂ©sormais rĂ©volu car aujourd’hui, elle Ă©tait pleinement heureuse et Ă©panouie…
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Mira sentit une agréable odeur de fraßcheur vivifiante.
Elle provenait du mobilier en bois de pin massif qui se trouvait dans le salon.
Il sentait agrĂ©ablement bon l’odeur des pins comme si on se retrouvait Ă lâintĂ©rieur de l’une de ces forĂȘts enivrantes et revigorantes capables de libĂ©rer votre esprit.
Une odeur certes piquante et quelque peu entĂȘtante mais que Mira aimait respirer Ă pleins poumons.
D’ailleurs, il n’y avait pas qu’elle qui apprĂ©ciait ces effluves mentholĂ©es.
Les rares convives qui passaient Ă la maison aimaient aussi lâhumer tout en faisant quelques remarques agrĂ©able Ă son sujet :
« Hum, quelle agrĂ©able senteur Laura ! On se croirait dans une forĂȘt de pins tellement c’est vivifiant ! »
Ils pensaient alors que cette forte odeur de rĂ©sine devait sans aucun doute provenir de bougies d’ambiance alors qu’il n’en Ă©tait absolument rien.
Et c’est lĂ que quelque peu amusĂ©e, Laura leur rĂ©pondait toujours invariablement ceci :
« Il s’agit de mes meubles et non de bougies parfumĂ©es. Ils sont tous en bois de pin »
Sâensuivait alors un petit silence d’Ă©tonnement rapidement rompu par quelques exclamations :
« Mais ce n’est pas possible !! Tu plaisantes ? Ăa sent tellement bon. Tu en es certaine ? »
Et à son tour, elle leur rétorquait de son joli sourire un brin moqueur :
« C’est pourtant bien vrai. Et pour faire perdurer leur odeur si plaisante ; j’utilise une cire d’abeille liquide Ă base d’huile essentielle de pin pour bien les nourrir et les faire briller. VoilĂ le secret. Ni plus ni moins »
Mira aimait alors voir lâexpression de leurs visages dubitatifs comme s’ils ne croyaient pas du tout Ă ce que venait de leur rĂ©vĂ©ler sa Maman.
Et cela l’amusait d’autant plus lorsque venait le moment fatidique oĂč ils se rapprochaient du grand buffet en pin pour pouvoir le renifler de trĂšs prĂšs ; histoire de vĂ©rifier ses dires…
Oui, cela l’amusait toujours beaucoupâŠ
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Mira s’approcha du grand buffet en pin et commença Ă l’humer intensĂ©ment.
Elle ne pouvait s’empĂȘcher de faire ce petit rituel Ă chaque fois qu’elle passait par ici, avant de franchir le seuil de la cuisine.
Elle le respira de trĂšs prĂšs et trĂšs longuement.
Cette effluve lui rappelait toujours celle de la forĂȘt qui se trouvait Ă quelques mĂštres de leur demeure.
Quelques fois et lorsque Laura n’Ă©tait pas lĂ ; elle aimait bien s’y aventurer tout en sachant que c’Ă©tait un lieu qui lui Ă©tait interdit.
En effet, Laura l’avait souvent mise en garde Ă ce sujet, lui rĂ©pĂ©tant inlassablement les mĂȘme paroles :
« Je te prĂ©viens encore Mira ! Tu ne dois pas aller dans cette forĂȘt ! C’est bien trop dangereux et tu pourrais t’y perdre. Pourtant, je suis certaine que tu me dĂ©sobĂ©iras encore. Mais, tu ne devrais pas faire ça. J’espĂšre que tu ne le feras plus et que tu resteras bien sagement ici chez nous sinon je dirais Ă Madame Sanchez de te garder chez elle »
Oh non ! Surtout pas Madame Sanchez !
Mira n’aimait pas du tout cette vieille dame avec sa grosse voix Ă©raillĂ©e dâancienne fumeuse qui la faisait toujours peur.
Mais ce qu’elle dĂ©testait par-dessus tout Ă©tait bien lorsqu’elle celle-ci la prenait dans ses bras pour lui faire des cĂąlins…
Elle avait alors l’impression de littĂ©ralement Ă©touffer sous ces innombrables baisers baveuxâŠ
Berk ! Elle nâaimait pas ça du tout !
Non, par pitiĂ© ! Surtout pas Madame Sanchez qui Ă©tait Ă son goĂ»t bien trop dĂ©bordante d’amour envers elleâŠ
Certes, elle Ă©tait trĂšs gentille mais elle n’aimait pas son cĂŽtĂ© envahissant et disons-le trop Ă©touffant.
Madame Sanchez était une vieille dame ùgée de 90 ans qui vivait seule dans une grande demeure qui se trouvait non loin de la leur.
Elle n’avait plus aucune famille mais fort heureusement pas mal d’amis du voisinage y compris sa Maman venaient rĂ©guliĂšrement lui rendre quelques petites visites pour lui changer les idĂ©es et prendre de ses nouvelles.
Ă ces moments lĂ , elle semblait alors beaucoup plus gaie.
Cependant, la solitude devait parfois la peser et câest pourquoi elle avait autant besoin de transmettre son amour Ă tous ceux qui la cĂŽtoyaientâŠ
Mira compatissait et avait de la peine pour elle alors elle acceptait sans trop rechigner ses bisous baveux ainsi que ses petites mignardises bien trop sucrés.
Elle savait aussi que Madame Sanchez adorait s’occuper d’elleâŠ
NĂ©anmoins, elle n’aimait pas du tout rester en sa compagnie car elle s’ennuyait Ă mourir dans sa vieille maison et ce malgrĂ© la distrayante balançoire qui se trouvait dans son jardin.
Non ! Rien n’y faisait ! C’Ă©tait comme çaâŠ
Et Laura ne le savait que trop bien alors pourquoi lui infliger un tel chantage Ă chaque fois qu’elle s’absentait de la maison ?
Certes, la forĂȘt lui Ă©tait interdite mais pourquoi en faire toute une histoire surtout qu’elle Ă©tait trĂšs dĂ©gourdie pour son Ăąge et pas du tout du genre Ă se laisser influencer par n’importe qui et n’importe quoi…
Alors pourquoi ne pas lui faire tout simplement confiance ?
De toute façon, elle persisterait Ă aller dans sa forĂȘt et ce malgrĂ© les nombreuses recommandations de Laura.
Ce n’Ă©tait sans doute pas trĂšs prudent de sa part, mais elle aimait le goĂ»t du risque et de l’aventure alors pourquoi s’en priverait-elle ?
Et puis c’Ă©tait aussi de son Ăąge de faire des petites bĂȘtises, non ? !
Elle ne voulait surtout pas vieillir sans les avoir commises sinon elle le regretterai trĂšs certainement…
Et puis cela lui faisait le plus grand bien de s’Ă©loigner de temps en temps de cette maison et de son jardin, si immense soit-il.
Car oui ! Mira aimait se sentir libre !
Libre comme l’Ă©tait le vent ou encore ces moineaux qui piaffaient gaiement entre eux sur les branches des grands amandiersâŠ
Elle avait besoin de cette libertĂ© pour se sentir existerâŠ
Et la forĂȘt exaltait tous ses sens. Elle s’y sentait bien.
Elle aimait s’y balader mais toujours avec une certaine prudence car elle Ă©tait peut-ĂȘtre une grande aventureuse mais pas non plus une irresponsable inconsciente…
Elle savait fort bien que sa douce Maman Ă©tait une personne trĂšs inquiĂšte alors elle ne tenterait jamais le diable car elle l’aimait bien trop pour agir inconsidĂ©rĂ©mentâŠ
Mais Laura ne lui faisait pas encore entiĂšrement confiance. Elle l’a traitĂ©e toujours comme un bĂ©bĂ©âŠ
Son « petit bĂ©bĂ© » comme elle aimait l’appeler affectueusementâŠ
Mira aimait bien ce petit surnom mais elle ne le trouvait pas en accord avec sa personnalité intrépide.
De toute façon, personne ne pouvait lui mettre dâentraves pas mĂȘme sa bien-aimĂ©e MamanâŠ
C’est pourquoi, elle agirait toujours derriĂšre son dos durant ses absences pour pouvoir enfin partir en vadrouille.
Ben quoi ? Avait-elle le choix ?
Et il fallait qu’elle en profita encore car l’automne ne tarderait plus Ă arriverâŠ
Elle s’en Ă©tait bien rendue compte avec lâinterminable pluie d’aujourd’hui.
Elle savait alors qu’elle serait bien obligĂ©e de ralentir ses cadences dâaventuriĂšre dans sa forĂȘt ĂŽ combien si captivante car le temps hivernal deviendrait aussitĂŽt un obstacle avec son incessante et perpĂ©tuelle humiditĂ©.
Lâinsidieux froid que Mira dĂ©testait tant lâempĂȘcherait de faire ses petites escapadesâŠ
Comme le temps deviendrait alors trop long durant cette période !
Mais elle finit par se rassurer en se souvenant d’une belle image qui lui revint en mĂ©moire.